Dans les Landes, deux sœurs transforment la ferme familiale en misant sur la bufflonne
À 32 et 30 ans, Delphine et Adeline Delas viennent tout juste de reprendre la ferme familiale. Mais avec l’envie d’élever des bufflonnes, une idée bien différente de la réalité de leur père, éleveur de vaches laitières pendant 40 ans. Au Champ des bufflonnes, le cheptel est encore petit, mais la transformation est dans l’ADN avec un produit phare : la mozzarella.
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Au départ, elles ne souhaitaient pas forcément reprendre la ferme familiale, ou en tout cas, elles avaient en tête l’envie de faire autrement. Delphine et Adeline Delas viennent de s’installer sur les terres de leur père, ancien éleveur de vaches laitières à la retraite depuis huit ans. Basé à Tilh, dans les Landes (40), le Champ des bufflonnes prend, depuis quelques mois à peine, un premier envol prometteur.
Adeline et Delphine Delas se sont d’abord intéressées aux bufflonnes et à leur spécificité par rapport à la confection de la mozzarella. Très vite, elles se sont lancées dans des stages, puis ont franchi le pas d’acheter : « Nous avons appelé tous les élevages de France pour constituer notre troupeau ». C’est finalement en Bretagne, dans le Béarn et dans le Gers qu’elles ont trouvé leur bonheur.
Aujourd’hui 19 bêtes profitent de 1 300 m² de bâti qui accueillait auparavant 130 vaches laitières. Mais ça n’a pas toujours été facile pour les générations de se comprendre : « Quand on a parlé de notre projet à nos parents, ils n’y croyaient pas vraiment, en même temps c’est très différent de ce qu’ils ont connu, on passe d’un élevage intensif à un élevage extensif. » Depuis la retraite de leur père, plus aucune bête ne vivait sur la ferme : « Il a quand même apprécié de revoir des animaux sur la ferme même s’il ne connaissait rien à leurs spécificités. »
La ferme bénéficie d’une surface de 61 hectares en polyculture : du maïs, du triticale et du foin pour l’autoconsommation du troupeau toute l’année. Mais aussi une partie de prairies naturelles : « On a instauré un pâturage tournant pour nourrir les bufflonnes, elles changent de pâture tous les trois jours. »
Un apprentissage pas si simple
Alors que la canicule impacte fortement les animaux, les bufflonnes de Tilh sont en train de barboter dans la mare qu’ont creusée Delphine et Adeline. Si les deux sœurs admirent le caractère posé, loyal et respectueux de cette race bovine, elles n’ont pourtant pas été 100 % à l’aise de suite : « On a récupéré une grande partie du troupeau qui était à l’origine un élevage pour la viande, comme il n’y a pas de différence entre les races à viande et les laitières chez les bufflonnes, explique Adeline. Le problème c’est que ces bufflonnes n’avaient jamais été trop au contact de l’être humain et ça a été tout un apprentissage pour que l’on se fasse confiance. » C’est désormais chose faite et depuis novembre 2024, six petits sont nés : trois mâles et trois femelles. Six bufflonnes sont donc en lactation, étant donné que l’entièreté du troupeau est arrivée sur la ferme entre novembre 2024 et le printemps 2025.
Les sœurs Delas privilégient un renouvellement du troupeau au fil du temps avec l’envie d’ici quelques années d’arriver à une trentaine de bêtes, sans pour autant en acheter d’autres. Elles n’ont pour l’instant pas de salarié et se forment sur tous les postes pour être autonomes.
Avec un seul buffle dans le cheptel, prénommé Obama, les agricultrices ont choisi la saillie naturelle plutôt que l’insémination artificielle, même si elles avaient le choix. Les trois mâles seront valorisés pour leur viande, grâce à un boucher local qui fera la découpe. Mais il faut savoir que les bufflonnes ne peuvent être envoyées dans un abattoir traditionnel que jusqu’à huit mois. Leurs cornes, reconnaissables entre toutes, poussent trop ensuite et il faut alors faire appel à un matador.
De l’or blanc
En moyenne, les bufflonnes produisent chacune 5 litres de lait par jour : « C’est vraiment de l’or blanc, le lait bufflonne ne ressemble pas du tout à celui de la vache mais se rapproche plutôt de celui de la brebis au niveau du gras, voire plus gras », détaille Delphine Delas. Avec un taux butyrique qui oscille entre 80 et 90 grammes par litre et un taux protéique qui se situe autour des 45 grammes par litre, le lait de bufflonne assure un rendement très intéressant. Mais là encore, les sœurs Delas façonnent leur projet à leur rythme : « Nous faisons par exemple de la monotraite, ce qui n’est pas commun et qui a pu aussi surprendre notre famille au début. »
Après la traite du matin, direction le laboratoire pour le façonnage de la mozzarella, une étape cruciale et technique, mais aussi la fabrication de fromages frais et à pâte dure, qu’elles vont vendre sur le marché, dans des commerces locaux, à des restaurateurs et des pizzaïolos et surtout à la ferme, mais toujours en circuit-court. Tous les jours, elles confectionnent en moyenne une trentaine de mozzarellas qui pèsent 150 à 200 grammes. Mais depuis quelque temps, elles diversifient leur gamme, dans l’optique de régaler les papilles des locaux et de tester de nouvelles formules : « On est en train d’apprendre à faire de la burrata, témoigne Delphine. On fait aussi du fromage frais, un peu de camembert, et on envisage de faire des glaces, des yaourts, du riz au lait… »
Après 6 mois d’expérimentation avec du lait de vache, le temps que leur troupeau soit constitué et que les bufflonnes soient en lactation, les sœurs ont mis en vente leur mozzarella. En devenant les premières éleveuses de bufflonnes des Landes, elles ont réussi en quelques semaines à fidéliser leur clientèle.
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